La XIIe Session de la P. I. A. C.
C’est la douzième fois que les altaïstes de divers pays se sont réunis pour leur conférence annuelle (Permanent International Altaistic Conférence). Nous pouvons affirmer que cette douzième session a été l’une des plus réussies tant par le nombre des participants (plus de 150) que par la variété des sujets discutés (plus de 80).
Organisée par le Bereich Alter Orient du Zentralinstitut für Alte Geschichte und Archäologie relevant de l’Académie Allemande des Sciences de Berlin, la session a duré du 29 août au 2 septembre, 1969. Elle a eu lieu dans le bâtiment de l’Université Humboldt à Berlin, capitale de la République Démocratique Allemande. La session a reforcé le caractère international de la conférence : y ont participé les représentants de quinze pays, et, pour la première fois dans l’histoire de la P. I. A. C., nombreux savants soviétiques venus de Leningrad, de Moscou et de Tachkent y ont également assisté. Parmi les membres de cette délégation figuraient des savants représentant les peuples altaïques, turcs, mongols et tongous. C’est aussi la première fois que l’Académie des Sciences de la République Populaire Mongole y envoyait des délégués. (La présence des savants de Turquie est déjà traditionnelle, et on espère que cette heureuse tradition sera suivie par nos confrères mongols et soviétiques. Vu le grand nombre des participants et des exposés, la conférence s’est déroulée dans deux sections parallèles. Prenant ainsi les proportions d’un congrès, elle a perdu quelque peu de son intimité, caractère habituel des sessions précédentes.
Sous la présidence d’honneur du Prof. Dr. F. Hintze, membre de l’Académie Allemande des Sciences le présidium était constitué du président de la session : M. G. Hazai de l’Université Humboldt, du secrétaire général (dont la personne assure la permanence) : le Prof. Denis Sinor de l’Université d’Indiana, et des membres du comité préparatoire, parmi lesquels les professeurs H. F. J. Junker, P. Ratchnevsky, J. Schubert et F. Weller, maîtres éminents des études orientales en Allemagne.
A la séance inaugurale M. Junker a fait un exposé de l’évolution des études altaïques dans la République Démocratique Allemande au cours de ces vingt dernières années, puis M. Sinor a parlé de l’état actuel des recherches altaïques internationales et des tâches qui restent à remplir. Constatant l’essort mondial de ces recherches parallèlement à leur développement rapide dans le pays où la philologie altaïque (ou une de ses branches) constitue la partie la plus importante de la culture nationale (par exemple en Turquie, en Uzbekistan ou en Mongolie), M. Sinor insista sur la nécessité de la coopération des spécialistes des divers pays et sur le développement de l’information mutuelle. Il souligna l’importance des recherches sur l’histoire des peuples altaïques, domaine moins cultivé, mais non moins riche que les études linguistiques ou littéraires.
Une séance plénière a été consacrée à la mémoire de W. Bang-Kaup à l’occasion du centenaire de sa naissance. Le Prof. A. N. Kononov, membre correspondant de l’Académie des Sciences de l’U.R.S.S. et le Prof. Annemarie von Gabain, membre de l’Académie Allemande des Sciences ont évoqué le souvenir du grand altaïste allemand.
Cette session n’a pas eu de thème central. Dans leurs exposés les participants ont discuté toute une série de problèmes appartenant au domaine de la linguistique: l’affinité des langues altaïques (plusieurs explications du rhotacisme et du lambdacisme, l’identité structurale), certains détails de la grammaire, dialectologie, lexique, classification des langues et des dialectes, la réforme de la langue, études cibernétiques, recherches historiques; au domaine des recherches littéraires et folkloriques: littératures anciennes et modernes, genres folkloriques (épopées, contes), et au domaine de l’histoire (sources chinoises sur la préhistoire turque, l’époque mongole, relations interethniques, histoire moderne), de la religion (le tabou et ses formes linguistiques, notions et cultes chamanistes), de l’histoire de l’art et de la culture (iconographie, évolution des styles, migration des motifs).
Avec M. L. Ligeti à sa tête, un groupe de douze altaïstes hongrois a participé à la conférence. Les exposés hongrois ont été consacrés aux sujets suivants:
«Le vrai et le faux conte mongol» par G. Bethlenfalvy, «Sur un passage de l’inscription de Tonyuquq» par G. Hazai, «Les éléments turcs-osmanlis du hongrois» par Suzanne Kakuk, «Un livre mongol perdu et sa version ouigoure» par G. Kara, «L’importance de l’ethnographie et de l’histoire de la culture hongroises pour les recherches sur l’histoire de la culture des nomades éléveurs de l’Asie» par Käthe U.-Kőhalmi, «Éléments tokhariens du turc» par A. Róna-Tas et «Sur le culte des obo (tas de pierres) chez les Mongols» par Magda Tatár.
Grâce à l’hospitalité de nos confrères allemands et de l’Académie Allemande des Sciences qui avaient organisé une excursion à Potsdam, les participants de la conférence eurent l’occasion de visiter les lieux historiques et les parcs de Cecilienhof et de Sanssouci. Une réception de gala fut donnée par le président de l’Académie Allemande des Sciences le dernier soir de la conférence. Les participants eurent aussi la possibilité d’admirer les expositions du Musée Pergamon et de consulter la Bibliothèque d’État et la Collection de Turfan. Une exposition de livres, organisée à l’occasion de la conférence a permis aux participants de voir et d’acquérir les travaux des altaïstes de la République Démocratique Allemande et certains ouvrages anciens réédités.
A la dernière séance plénière on a discuté des questions d’organisation. En présence de deux lauréats, MM. Ligeti et Rintchen, les participants votants ont adopté la proposition de décerner la médaille d’or de l’Université d’Indiana à Sir Gerard Clauson pour ses mérites dans le domaine des études altaïques. Acceptant l’invitation de Mme I. Mélikoff, directeur de l’Institut de Turcologie de l’Université de Strasbourg, la P. I. A. C. a décidé de tenir la XIIIe session en France.